PARCOURS D’UN COMBATTANT HORS NORMES
INTERVIEW DU FONDATEUR DU KHIDO
Maître Michel MORLON Fondateur du KHIDO et du site www.maitrisedesoi.com nous expliquera au cours de cette interview le pourquoi de sa remise en question des Arts Martiaux, sa recherche pour aboutir à la création du KHIDO, véritable enseignement de la Connaissance et la Compréhension pour atteindre la vraie Maîtrise de Soi à travers Soi et non à travers son Maître, cela quelque soit sa discipline sportive…
Tout d’abord, nous sommes enchantés de vous voir à la tête d’une nouvelle Ecole affiliée à la Fédération Française de KARATÉ et Disciplines Associées.
Avant de nous expliquer ce contexte, en quelques lignes, votre parcours.
Maître Michel MORLON (M.M.) : J’ai commencé les Arts Martiaux au Vietnam où j’ai pratiqué le Karaté, le Kung Fu, le Taekwondo, le Judo et d’autres Arts Martiaux. En 1971, j’ai été le premier compétiteur en France à tenter et à réussir à mettre K.O. un adversaire, sur coup de pied retourné. De la même façon, j’ai été le premier à réussir à marquer, sur coup de pied sauté, en compétition de Karaté. Avec mes élèves, nous allions participer à toutes les manifestations, que ce soient à Coubertin ou à la Porte Pouchet à Paris. J’ai également participé à de très nombreux événements tels que la rencontre de Full Contact FRANCE – USA en 1976 avec, dans l’équipe, Dominique VALERA. J’aimais la compétition mais, à mes yeux, c’était surtout un test technique. La médaille ne m’intéressait pas vraiment.
Après avoir formé un certain nombre de Gradés de Karaté et de Taekwondo en France (Jean-René CHAPON, Thierry JOURNO, Rémi MOLLET, Jean-Laurent TADDEI et d’autres…), j’en suis venu arriver à me poser un grand nombre de questions sur ma pratique, qui ne me satisfaisait plus pleinement. Au fond de moi, je ressentais qu’il devait y avoir sûrement autre chose et qu’il fallait repenser totalement toute ma façon de faire. Je n’arrivais pas à m’épanouir pleinement. J’ai tenté de trouver la Sérénité en examinant notamment les différentes Religions (Bouddhisme, Catholicisme, Islam, Judaïsme…) mais ces pratiques ne me l’ont pas apportée.
En 1985, j’ai créé le KHIDO « Voie de l’énergie harmonieuse ».
Cela, afin de me trouver et de tracer justement une nouvelle voie. Pour arriver jusque là, j’ai décidé d’abandonner la plupart des formes techniques et de chercher une véritable sensation. Pendant de très nombreuses années, une poignée d’élèves a continué à travailler dans cette direction. J’ai pensé que le moment était venu de faire partager cette expérience et de structurer les choses sur un plan Fédéral.
Quel a été votre axe de travail ?
M.M. : Je me suis posé une multitude de questions dans beaucoup de domaines et je me suis dit : les Dieux, les Maîtres, les Concepts, il faut les mettre de côté ! Je vais chercher dans le « Maître » que je suis. Et j’ai commencé à tester, à me rechercher, à me ressentir, à chercher le « Maître » qui est en moi, qui est potentiellement, en chacun de Nous.
Quand on se dit » Bonjour « , on se serre la main, cette habitude est anglo-saxonne. Si nous avions eu une autre influence étrangère, peut être que nous nous saluerions autrement. Ce n’est qu’une forme ! La position Zen Kutsu Dachi, c’est une forme, qui n’a de valeur que si on l’a ressent. Dans la Société, il y a des formes à respecter. Mais il y a La Forme et Le Fond. Pour ce qui est du Fond, vous devez ressentir votre Zen Kutsu, je dois Etre LE Zen Kutsu, LE VIVRE.
Lors d’un stage que j’animais, un élève m’a demandé : » Maître, est ce que ma position est correcte ? Je lui réponds : » Quand vous vous mettez au lit et que vous cherchez votre meilleure position pour vous endormir, est-ce que vous vous demandez si votre position est bonne ? » Trouvez votre position, c’est la Vôtre ! Et personne, au Monde, ne pourra dire le contraire. A partir du moment où vous la ressentez.
Il faut faire UN avec la position, notre position. Pour « ÊTRE ». C’est cela la chose la plus importante, pour moi, dans les Arts Martiaux, c’est faire UN avec la Technique, faire UN avec le Mouvement.
Mais le fait de vouloir ressentir la position ne risque-t-il pas de conduire à modifier cette forme pour l’adapter à soi ?
M.M. : Cela n’empêche pas qu’il faut respecter les Formes : En France, on roule à droite, c’est une forme. Dans certains pays, on roule à gauche. Je respecte la forme et je ne dis pas que la France ou que l’Angleterre ont tort d’opter pour tel ou tel coté de la chaussée. Le Fond, c’est de rouler. La Forme, c’est de rouler à droite ou à gauche. Une fois que vous vous êtes maîtrisés, vous pouvez vous mettre dans telle ou telle position.
Apprendre c’est une chose, avoir une connaissance en est une autre. Mais la meilleure des Connaissances, pour moi, c’est la Compréhension. Vous avez un ami, vous le connaissez mais vous ne le comprenez pas, dans ce cas votre Amitié ne pourra pas s’épanouir.
Mais concrètement, quel est le moyen de savoir si l’on ressent ou non une position ?
M.M. : Vous adoptez une position. A partir de là, essayez de vous déplacer, de faire quelque chose.
Êtes-vous à l’aise ? Pourquoi ? Parce que c’est Votre sensation, ce n’est pas à moi de vous dire si vous ressentez ou si vous ne ressentez pas. L’important est que vous soyez à l’aise, que vous ayez conscience de Vous, de vos articulations, de votre Corps. Chaque fois, que vous vous remettrez dans cette position, ce sera à chaque fois, légèrement différent et non stéréotypé, parce que c’est le Fond et le Fond n’a pas de Forme. Un peu, comme quand on fait une signature.
Il faut que la Force aille dans le « bon sens ». Imaginez même si vous rampez sur l’Autoroute du Sud pour aller à Nice, ce n’est pas grave, vous y arriverez un jour ou l’autre. Par contre, si vous prenez l’Autoroute du Nord, vous n’arriverez jamais à Nice. Si vous continuez à répéter toute votre Vie sans ressentir les mouvements de l’Intérieur, un jour ou l’autre, vous en aurez assez. Parce que vous étiez dans une fusée très rapide mais vous n’avez jamais vu Nice, pas même Lyon.
Comment ai-je progressé ? Tout d’abord, en cassant les formes. J’ai cherché avant tout, la SENSATION. C’est ce qui devrait être enseigné puisque les Arts Martiaux passent par le Corps. Et le Corps, c’est unique, c’est ce qui nous appartient. Nous devons donc d’abord LE ressentir. Il y a les Arts Martiaux et la Philosophie des Arts Martiaux. La Philosophie rentre dans le Fond et les Techniques rentrent dans les formes.
Selon vous, à quoi sert une position ?
M.M. : A quoi sert normalement une position ? A être plus fort. On ne doit passe sentir gêner par sa posture. Quand quelqu’un se met en position de Zen Kutsu, est ce qu’il se sent plus fort ? Normalement oui, parce que c’est destiné à cela, si je me mets dans telle ou telle position, je me sentirais normalement plus fort. Comme on dit, à l’Armée, » j’ai pris position » c’est pour se renforcer et non pour s’affaiblir.
Quelle différence faites-vous entre la contraction et la tension ?
M.M. : Quand je pratique les Arts Martiaux, je suis sans cesse, en tension mais du tout contracté. C’est un peu comme je tends la main à quelqu’un ; mon bras est tendu, mais je ne suis pas contracté. Dans le même ordre d’idée, mes jambes sont tendues et me permettent de me tenir debout. Si elles ne sont pas sous tension, je vais tomber.
La plupart des Maîtres d’Arts Martiaux ne fait pas toute la différence entre la tension et la contraction.
Prenez une lance d’incendie de pompier. Disons qu’il y a, par exemple, une pression de 10 bars dans le tuyau. On ferme l’extrémité, le tuyau est au sol. Prenez en un bout, mettez le pied dessus, vous pourrez plier le tuyau sans problème ! A présent, ouvrez la lance, il y a moins de pression dans le tuyau puisque l’eau s’éjecte à l’extérieur. La pression tombe. Pourtant aucun Etre au monde ne pourra plier la lance ! Pourquoi ? Parce que la Vie sort de la lance.
Et c’est dans la Vie que vous passez la Force.
C’est toute la différence entre une Technique (la Forme) et le Mouvement, la Vie (le Fond).
Parlez nous des blocages et des frappes dans votre Ecole.
M.M. : Le blocage n’existe pas, il n’y a que des parades. Pour appliquer pleinement et efficacement ce que vous apprenez, vous devez, là encore, le ressentir. Pourquoi tous les blocages se font ils si puissamment ? En fait, il n’y a pas de blocage…
Ce sont des coups.
Autrefois, les gens étaient aguerris : leurs bras, leurs avant bras, leurs tibias, c’étaient des armes ! L’idée était de casser l’attaque.
De nos jours, on a des bras en verre. Voilà pourquoi, quand vous vous entraînez aux blocages, vous le faites « doucement » pour ne pas vous faire mal, donc le travail devient négatif !
De même, on parle de coup de poing. Demandez-vous sincèrement, si vous ressentez votre coup de poing, votre bras ou votre épaule ! Bien trop souvent, on donne un coup de bras ! De plus, si vous contractez votre bras, le choc revient vers vous. C’est comme si, vous deviez envoyer un boulet de canon, un missile, cela doit toujours aller VERS une cible et non vers vous. Or, si vous vous contractez, l’impact revient vers vous.
Quand vous donnez un coup de poing « traditionnel » et qu’on essaye de vous le tordre vers le haut ou vers le bas, vous sentez une faiblesse. Par contre, si vous donnez le coup de poing en ayant le poignet avec un certain angle d’inclinaison, vous êtes « bizarrement » plus fort, contrairement à toutes les théories établies en la matière. La position du poignet traditionnel repose sur une vision mathématique ; l’idée que quelque chose qui est perpendiculaire rend le matériau plus fort. Mais nous ne sommes pas des matériaux, nous avons un organisme, des articulations.
Lorsque je donne un coup de poing avec mon poignet « tordu », les gens pensent que je suis débutant. De même, pour mes positions qui ne sont pas très « académiques ». Une fois que l’on a la Maîtrise de Soi, on peut adopter n’importe quelle position.
Quel conseil général pourriez-vous donner à nos lecteurs ?
M.M. : En résumé, VIVEZ ! Vivez toutes vos positions, toutes vos techniques. D’ailleurs, pour tout, il faut vivre : quand vous travaillez, si vous avez la tête ailleurs, vous travaillez mal. Quand vous mangez, si vous ne vivez pas votre repas, par exemple si vous êtes enrhumés, vous ne sentez plus ce que vous mangez, alors vous n’appréciez pas complètement votre repas. La Vie a besoin de Sensations, de Compréhension. Par contre, si vous êtes esclave d’un concept, vous ne pouvez être Maître de vous, quel que soit le concept, que ce soit un concept physique ou mental.
Pour finir, parlez nous de votre Affiliation à la FFKDA.
M.M. : En entrant à la FFKDA, nous souhaitons initier un projet de développement. La première phase va consister en une série de stages,d’interviews et/ou de conférences sur toute la France. Je voudrais présenter notre façon de travailler un peu partout. Que les personnes ou les Clubs intéressés n’hésitent pas à contacter la FFKDA ou aller sur notre site.